Communiqué de JOFFRE au Ministère de la Guerre
13 septembre 1914
"Notre victoire s'affirme de plus en plus complète. Partout l'ennemi est en retraite. Partout les Allemands abandonnent des prisonniers, des blessés, du matériel. Après les efforts héroïques dépensés par nos troupes pendant cette lutte formidable qui a duré du 5 au 12 septembre, toutes nos armées surexcitées par le succès exécutent une poursuite sans exemple par son extension... Le gouvernement de la République peut être fier de l'armée qu'il a préparée."
LA PREMIÈRE BATAILLE DE LA MARNE : Pour mener la guerre déclarée le 3 août 1914, Joffre est le commandant en chef de la première armée de masse, issue de la conscription. Pour la première fois de notre histoire militaire, nos soldats savent lire et écrire. Ils ont aussi reçu une formation civique et militaire.
Le peuple belge résiste, l'armée belge repliée à Anvers, harcèle l'arrière garde de la première armée allemande de von Klück.
Les Britanniques sont battus à Mons, les Français sont battus sur la Sambre et à Charleroi. A partir du 12 août 1914, les Russes ouvrent un front en Prusse orientale, ce qui entraîne l'envoi vers l'Est de l'Europe, de troupes allemandes qui se dirigeaient sur Paris.
Le 23 août, parce qu'il a besoin de temps et d'espace, Joffre décide la retraite. Le 6 septembre, Joffre lance l'Ordre du jour aux armées françaises épaulées par les Britanniques. " ….. On se fera tuer sur place plutôt que de reculer …. ".
Le texte est gravé intégralement sur le monument national de Mondement. Ce fut le plus formidable redressement de notre histoire militaire. Des soldats français, britanniques et allemands s'affrontèrent sur un front de 300 km, de Senlis à Verdun. Ce fut la semaine la plus meurtrière de la Grande Guerre. Joffre fut le stratège de la plus grande bataille de tous les temps qu'il nomma la Marne.
- La reprise du village et du château de Mondement par les fantassins du 77 RI et les zouaves du général Humbert, le 9 septembre au soir, marque l'arrêt des combats à l'ouest de la grande bataille.
- l'invasion allemande fut stoppée.
- la première tentative de domination allemande sur l'Europe fut repoussée. La Marne fut une de ces batailles d'arrêt qui ont jalonné notre histoire, ce fut aussi une victoire.
A PROPOS DE LA BATAILLE DE LA MARNE.
Par le colonel Marc NEUVILLE
Le colonel NEUVILLE fut professeur d'histoire à l'École de Saint Cyr, Conservateur du Musée des Invalides. Actuellement Président de l'association des Amis du Fort de la Pompelle à Reims, il nous livre quelques réflexions sur la bataille de la Marne.
Ce texte ne se veut ni le récit exhaustif de la bataille de la Marne, ni même le récit des combats des premiers jours de septembre 1914. Ce ne sont que quelques réflexions sur cette bataille où les képis rouges, dans un ultime sursaut, ont fini par bousculer les casques à pointe.
Comparaison d'abord avec cette autre grande bataille que fut Verdun.
La Marne et Verdun.
Pour la génération des fils des combattants de 14, nourrie de récits guerriers, le plus souvent âtroces et même parfois cocasses, tout l'esprit de la France en armes, paraissait s'être incarné dans le nom magnifié de Verdun. Le courage individuel y avait été porté à un point inimaginable. Une lecture moins passionnée de l'Histoire m'incline à bouleverser l'échelle des valeurs combattantes, en voyant plutôt dans la bataille de Verdun, une défaite allemande plutôt qu'une victoire française. Le sort de la guerre n'a pas basculé à Verdun.
Il n'y a en effet de victoire que dans l'offensive, j'en appelle pour soutenir ma thèse, aux ombres formidables de Turenne, Napoléon, Foch et Juin.
La défensive statique ou dynamique, lors d'une retraite, ne peut être acceptée que comme la préface incontournable à la reprise de l'offensive.
En attaquant dans un pays hostile et mal connu, l'ennemi prend tous les risques, allonge ses lignes de communication et doit assurer sa sécurité envers toutes les formes de résistance.
En reculant à travers un pays connu et partisan, l'armée amie se rapproche de ses bases et de ses renforts, elle a le choix des positions favorables, pour freiner l'avance de l'adversaire et elle peut concentrer ses moyens en épiant son essoufflement, de façon à le bousculer et reprendre ainsi l'initiative.
Or ce schéma correspond, à peu de chose près au déroulement de la Bataille de la Marne qui constitue, elle, une authentique victoire.
La direction suprême allemande : le Comte von Moltke.
Nous savons aujourd'hui que la formidable machine de guerre allemande de 1914, qui paraissait sans faille, était, en fait, affligée de deux faiblesses capitales, qui aidèrent à la victoire françaises, mais qui ne pouvaient pas être prise en compte dans l'évaluation du rapport des forces établi par l'Etat-major français.
A sa tête un homme brillant, von Moltke, ami du souverain, cultivé et splendide soldat du temps de paix. Il se révéla aux jours de l'action, inerte et incapable d'imposer sa volonté à ses commandants d'armées. Ceux-ci en profitèrent pour afficher au grand jour, leurs ambitions et leurs rivalités et pour malmener à leur guise le plan général d'opérations. Son succès reposait sur leur discipline intellectuelle mâtinée d'une pointe d'initiative, à condition qu'elle ne remette pas en cause la volonté initiale du chef.
En l'absence morale et intellectuelle du chef ( et parfois aussi matérielle…), le carcan de sa pensée vola en éclats et les initiatives fusèrent de toutes parts, plus malencontreuses les unes que les autres et sans aucune coordination au sommet.
Or ces grands subordonnés, jaloux les uns des autres, étaient en charge d'un plan d'opération qui depuis sa première formulation par le général von Schlieffen, avait été édulcoré et affaibli sous prétexte d'amélioration par son successeur von Moltke.
Le Plan allemand : le plan von Schlieffen.
Partant du principe que les Français étaient plus immédiatement dangereux que leurs alliés russes, le plan Schlieffen jetait à travers la Belgique, au mépris de tous les traités, la grande majorité de l'armée allemande. En un seul grand mouvement tournant, elle devait se rabattre à l'ouest de Paris, pour conquérir la capitale et prendre à revers l'armée françaises, dont on pensait qu'elle serait engagée dans l'offensive en Lorraine annexée.
Heureusement pour nous, à partir de 1906, von Moltke, influencé par le renouveau russe et par le souci d'améliorer le plan de son prédécesseur, dégraissa peu à peu l'aile marchante allemande. Cela se réalisa au profit de la défense de la Prusse Orientale et d'une contre offensive en Lorraine, devant précipiter la défaite française.
Toutes ces divisions soustraites à l'action principale allemande, sous prétexte de la compléter compromettaient sa réussite. Elles symbolisaient le dos tourné par von Moltke au principe de l'unité d'action qui, depuis le fond des temps, veut que l'on applique le maximum de ses moyens sur l'effort principal de son plan, quitte à pratiquer quelques impasses sur les directions secondaires.
Ainsi dénaturé, le plan allemand, de surcroît peu ou pas dirigé, portait en lui-même le germe de son échec. Cependant il fut bien près de réussir et l'on peut frémir rétrospectivement sur ce qui se serait produit, si le schéma initial avait été appliqué en toute rigueur.
La stratégie de Joffre.
Heureusement pour nous, le général Joffre était tout l'opposé de son vis à vis le général von Moltke. Il tint en main nos armées bousculées, pour sauver Paris et éviter l'encerclement de nos forces. Il lui fallut pour cela ne pas céder au pessimisme des mauvaises nouvelles, réagir au mieux devant les initiatives ennemies et même prévoir celles-ci assez tôt pour les contrarier. L'échec du choc initial en Lorraine et la poussée allemande en Belgique le contraignent à redresser vers le nord l'axe de nos troupes.
Lorsque la poussée allemande contenue heureusement autour de Verdun par Sarrail, renonce à investir Paris, il lui apparaît qu'une contre manœuvre peut être envisagée, à condition de déplacer le centre de gravité de nos armées.
L'armée Foch, la 9ème armée.
Joffre a prélevé sur les armées de Lorraine les divisions qui vont rejoindre la 6ème armée de Maunoury et ensuite la 9ème armée de Foch. L'armée allemande risquait alors en prenant la forme d'une poche, de disjoindre la 4ème armée de Langle de Cary et la 5ème armée de Franchet d'Esperey.
Cette armée Foch, créée sur l'Aisne va demeurer au centre de notre dispositif, d'abord dans la retraite, puis dans la contre-offensive ; c'est elle qui va se trouver au point crucial de la bataille entre Sézanne et Mailly-le-Camp.
Le retraite ordonnée s'accomplit dans un désordre inévitable, si on songe aux innombrables voitures hippomobiles séparées de leurs unités et faisant demi-tour parfois au contact de l'ennemi.
Abandonnant Reims et ses forts, intacts et désarmés, l'armée Foch jalonne l'avance des armées de von Bülow et von Hausen qui passent la Marne et s'enfoncent en Brie Champenoise entre le 1er et le 4 septembre.
L'armée Maunoury, la 6ème armée.
L'ensemble des armées françaises n'a été ni rompu, ni encerclé, pendant cette épouvantable retraite. Joffre décide de lancer la nouvelle armée Maunoury dans le flanc de l'aile marchante allemande, constituée par l'armée de von Klück.
Mais la surprise de cette action de flanc, ne peut jouer. Von Klück jusque là imprudemment engagé au sud de la Marne, décide de se couvrir à l'ouest, en faisant rétrograder une partie de ses forces face au camp retranché de Paris.
Ce sont ces deux forces qui se heurtent de front, aux environ de Meaux, le jour de la mort du Lieutenant Charles Péguy, tué à la tête de ses hommes, le 5 septembre 1914. La contre manœuvre de Joffre semble donc être un échec, mais en fait elle va déclencher toute une série d'actions qui conduiront à la victoire.
A l'inverse von Moltke, qui se tient loin de l'action, contrôle mal ses commandants d'armées qui se comportent en rivaux.
Von Klück et von Bülow font voler en éclat le plan allemand.
Puisqu'il faut enfoncer le flanc allemand, Joffre va tenter de stopper l'avance ennemie et lancer une contre-offensive frontale.
Il sera aidé par la désunion qui règne entre von Klück et von Bülow. Chacun court après le succès, créant entre eux une brèche où risque de se lancer le corps expéditionnaire britannique qui vient de cesser sa longue retraite.
La situation des deux armées.
Les forces en présence sont d'égale valeur et les malencontreuses décisions allemandes, ont mis les effectifs qui s'affrontent au même niveau.
On peut pousser plus loin la comparaison en disant que les deux cavaleries, aussi brillantes l'une que l'autre, ont fait également faillite, dans leur missions de reconnaissance et de poursuite et que cela va malheureusement continuer.
1870 ou 1914 ? L'uniforme des fantassins français avait peu changé
Les deux artilleries disparates par la présence d'artillerie lourde dans les rangs allemands, ont été très efficaces. Leurs engagements, dépassant en ampleur et en intensité ce qui avait été prévu, ont épuisé leurs coffres et elle ne pourront plus jouer un rôle aussi important dans les derniers jours de la bataille.
Les services divers sont généralement dépassés par les évènements. Les blessés sont trop nombreux, le ravitaillement est impuissant à satisfaire les besoins des unités qui tenteront de vivre sur le pays.
La solde n'est pas payée. Le courrier inexistant. L'information est volontairement nulle pour éviter la propagation de quelques mouvement de panique et ces deux millions de combattants, face à face, réduits à leurs propres ressources, ne se doutent pas que les plans de leur Etat-major viennent de faire faillite et que d'eux seuls, va dépendre le sort de leur pays tout entier.
La fin de la bataille.
Tandis que l'aile droite allemande recule, en se dissociant au centre, les Saxons de von Hausen pèsent de tout leur poids sur le mince rideau de troupes de Foch et de Langle de Cary. Le 8 septembre, tout en tenant tête au Kronprinz à Verdun, Sarrail parvient à faire glisser vers de Langle de Cary un corps d'armée pour le soutenir. Cela va permettre à ce dernier de soulager Foch en étendant sa gauche jusqu'à Mailly.
Bataille de la Marne 6 au 12 septembre 1914 Maurupt (Marne)
Champ de bataille à l'est de Pargny-les-saulx
Cependant les 8 et 9 septembre, alors qu'à l'est les allemands sont contenus, alors qu'à l'ouest ils reculent, au centre, ils portent à l'armée Foch les coups les plus durs. Pour renforcer sa droite, Foch fait glisser la 42ème division de Grossetti vers l'est de son front d'armée. Au passage, au large de Mondement, Grossetti engage son artillerie pour soutenir la division marocaine du général Humbert. Vers 16 heures, la 42ème division est à Connantre. Les Allemands se retirent.
Von Hausen est, à son tour, entraîné par le repli général de l'armée allemande. Pour paraphraser la boutade bien connue de Joffre (1) :ça n'est peut être pas entre Mondement et Mailly-le-Camp, le 9 septembre 1914, que la bataille de la Marne a été gagnée, mais c'est sûrement là qu'elle aurait été perdue… Si l'œil du chef et l'exceptionnelle ténacité des soldats français n'avaient pas réussi à tenir, juste un peu plus de temps que l'ennemi n'était capable de l'assaillir. et ces fantassins, épuisés, affamés, brûlés par le soleil, dont certains ont accompli durant le mois d'août, trente kilomètres par jour, vont repartir en avant, pour une poursuite qui va les payer de leur fatigue.
Les vainqueurs de la Marne, ce sont bien ces soldats français, unis autour de leurs chefs et de leurs drapeaux, forts de ce que leurs parents et leurs maîtres leur avaient mis dans le cœur et qui, toutes classes confondues, formèrent l'inébranlable rempart de la Patrie.
(1) " Je ne sais pas qui a gagné la bataille de la Marne, mais je sais qui l'aurait perdue "Joffre
LA BATAILLE DE MONDEMENT -
Texte de Mireille Domenichini d'après " La bataille de Mondement" d'Elie Chamard, 77°RI
" Si des millions de Français restent une nation libre et fière, c'est certes grâce à l'admirable concours, entre le 6 et le 12 septembre, des 6 armées qui combattaient de l'Ourcq à la Meuse; mais c'est le 9 septembre plus précisément encore, à l'héroïque effort d'une poignée de soldats, jetés par Foch sur Mondement."
Louis Madelin
Le château de Mondement commandait la crête qui séparait les allemands de la plaine de champagne, voie royale pour atteindre Paris.
Ce " pivot " devint le 9 septembre 1914, le point chaud où les régiments de la division marocaine, renforcés par 2 groupes du 49° RAC et par le 77° RI , menèrent un combat légendaire.
C'est au crépuscule, lorsque le général Humbert, à son quartier général de Broyes, reçut le message du colonel Lestoquoi : "Je tiens le village et le château de Mondement. Je m'y installe pour la nuit", que l'on a pu considérer que la grande bataille commencée le 5 septembre était pratiquement gagnée.
La bataille de Mondement
1) - 8 septembre 1914.
2) - 9 septembre 1914
3) - La prise du village et du château par le capitaine Purgold et le 164° Hanovrien.
4) - La reprise du château et du village par le 77° RI, les deux groupes du 49° RAC et les éléments organiques de la division marocaine.
- La patrouille Ceccaldi 9 h.
- Le 77° RI.
- Le 49° RAC.
- Les éléments de la division marocaine 14 h 30
- L'escarmouche que les allemands appelleront la 3° attaque française 16 h 30
- L'artillerie française 18 h 00
- Evacuation du château par les allemands 18 h 30.
- Prise du château vide par le 77° RI quelques minutes plus tard.
On se retranchera solidement, on se défendra à outrance... Mais on aura soin de ne laisser personne dans le village proprement dit. Disposez vos unités de façon à vous relier à droite avec le général Blondlat, à gauche avec la régiment Cros." Cet ordre va générer la suite des événements. Le lieutenant colonel Fellert considère qu'il ne doit pas occuper le village et le château.
Ce "malentendu" dans l'interprétation d'un ordre sera sévèrement critiqué par le général Réquin en 1930. Il écrira dans la revue militaire française : "Le régiment Fellert aurait quand même pu et dû de lui-même occuper le bastion du château de Mondement."
Le lieutenant colonel Fellert donne l'ordre aux zouaves du bataillon Modelon de creuser des tranchées en avant du village de Mondement et non dans le village.
Malheureusement, ce bataillon est à l'autre bout du champ de bataille à la crête du Poirier. Le lieutenant colonel Fellert l'avait prêté pour le 8 septembre au lieutenant colonel Cros qui, en accord avec la division a compris qu'il pouvait le garder aussi le 9 septembre.
Il y a un trou dans nos lignes à la hauteur du village et du château de Mondement. Seuls les tirailleurs et les zouaves se trouvent aux abords du village.
"Il va résulter de tout ceci un chassé croisé d'ordres et de contre-ordres dont certains n'atteindront pas les destinataires."Sur ordre de von Bülow, le Général von Emmich, commandant le X° corps doit attaquer Soizy-aux-Bois, Mondement avec la XIX° et la XX° Division.
C'est le 164° Hanovrien qui est chargé de la prise du village de Mondement et du château.
Il fait Brigade avec le 79° sous les ordres du colonel von l'Estocq.
Le colonel von Lamsdorf remet au Capitaine Purgold, qui commande le 2° bataillon, l'ordre suivant :"Son excellence von Emmich attache la plus grande importance à la prise de Mondement, et ordonne que le 164° hanovrien s'empare du village et du château à tout prix, quelles que soient les pertes." Les malentendus vont aussi exister dans le camp allemand.Le colonel von l'Estocq qui commande la 39° Brigade dont dépend le 164° Hanovrien, prépare une attaque de nuit pour le 8 au soir à 23 heures.
Devant l'état d'épuisement de ses hommes, il reporte l'attaque le 9 Septembre à 6 heures du matin. Mais il oublie de prévenir le 79°, dont 5 compagnies se mettent en marche à 23 heures. Le commandant Satchow qui commande le 79° apprend par un adjudant que le 164° est resté à Oyes. Il fait revenir ses hommes à leur point de départ.
Cette fois-ci le capitaine Purgold qui commande le 2° bataillon du 164° Hanovrien est averti à temps. A son bataillon, sont attachés:
- la 11° Compagnie, la section de mitrailleuse insérée dans la 8° compagnie.
- les 5, 6, 7, 8 et 11° en première ligne,
- la 7° en échelon, en arrière et à droite.Le 1er bataillon du capitaine Grave est à gauche avec la section de mitrailleuses, affectée à la 3° compagnie, les 1°, 2°, 3° en arrière et à gauche. Il doit soutenir l'attaque du 2° bataillon.
Le reste du régiment, soit 3 compagnies du 3° bataillon (capitaine Meyer) et une section de mitrailleuses, forme la réserve à Oyes avec le lieutenant colonel von Herzbruch, chef de corps du 164° Hannovrien.
Enfin la 3° compagnie du 10° bataillon de pionniers se tient dans le village en réserve de brigade.
Vers 2 heures du matin, le capitaine Purgold fait dire au capitaine Grave que, quelles que soient les circonstances, il partirait au lever du jour et qu'il comptait sur lui pour appuyer son mouvement.A son PC de Baye, von Emmich s'impatiente. Il faut briser la charnière de Mondement.
5 h 00
A 500 m du village, il voit des zouaves, sortis de leurs tranchées qui se dégourdissent. C'est le bataillon Jacquot. Purgold fait ouvrir le feu. Des zouaves tombent, dont le capitaine Clos.
Aussitôt notre artillerie : groupe Goyot du 49° (en position à l'étang de la Petite Morelle) et le groupe Geiger en batterie au Nord du bois de Mondement pilonnent Oyes, Villevenard et Saint-Prix.Le 79° et le 3° bataillon du 164° sont cloués sur place à Oyes, ils ne pourront jamais aller soutenir Purgold.
Les allemands installent des mitrailleuses au carrefour des routes de Mondement-Reuves-Oyes. De nombreux zouaves sont fauchés. Mais une fusillade partie des vergers ouest occasionne des pertes sévères : l'attaque allemande est bloquée à 500 m de Mondement.
7 h 30
Nos canons de 75 font mouche sur les fantassins allemands.
Purgold fait transmettre un croquis de la situation et une note réclamant des renforts au colonel resté à Oyes, il termine en écrivant : " Je compte être en possession de Mondement dans une heure." Il est 7 h 30.
" En avant !" Le lieutenant Naumann atteint vers 8 heures la ferme nord-est du village. Le sous-lieutenant de réserve Dettmer arrive avec ses hommes au mur nord du parc du château, il franchit par les brèches l'enceinte.
8 h 15
Le sous-lieutenant Dettmer organise la défense du château et ferme les grilles. Le capitaine Purgold et une trentaine d'hommes se sont emparés de la grosse ferme au sud-ouest du village. Il fait mettre deux mitrailleuses en position dans le grenier.
La reprise du village et du château par les Français. Le capitaine Clarion envoie une patrouille de 4 zouaves. L'ennemi les fusille à 50 m du château.
9 h 00
Il envoie une patrouille: la 2° section du sergent-major Ceccaldi. Les zouaves sont accueillis par des coups de feu. La 2° section est décimée. Dans le repli, les survivants entraînent la 16° compagnie qui les appuyait. Les pertes sont sévères.
Le capitaine Durand va rendre compte personnellement au général Humbert de ce qu'il a fait et vu.L'artillerie allemande est déchaînée, elle bombarde les bois, hors de portée de nos propres batteries, nos pertes sont terribles.
C'est l'heure la plus tragique, l'ennemi, quand il voudra, pourra parvenir à Broyes et Allemant.
Le général Humbert appelle au secours. Le général Dubois va répondre avec sa 42° Division, le général Grossetti ensuite avec le 77° RI.
L'attaque du 77° RI, colonel LESTOQUOI et de la 16°compagnie de zouaves du capitaine DURAND.
Le général Humbert communique au colonel Lestoquoi du 77° RI : "Toutes affaires cessantes, dirigez un bataillon sur Allemant, deux bataillons sur Broyes, je vous attend à Broyes."Le 2° bataillon du commandant de Beaufort, sous les ordres du colonel Eon 35° Brigade arrive à Allemant.
Le 1° bataillon du commandant de Merlis et le 3° Bataillon du capitaine de Courson de la Villeneuve arrivent à Broyes.
La 42° Division du général Grossetti a détaché les groupes Ménétrier et Aubertin des 2° et 3° batterie du 61° RAC (régiment d'artillerie coloniale). Ces groupes sont disposés à la sortie de Broyes vers Mondement. Le colonel Boichut qui a eu l'idée de prêter ses canons dirige le tir sur le château et le village. Mais sans ligne téléphonique, le tir est approximatif. Le colonel Boichut, le "virtuose du 75" dirige en personne mais vers 11h 15 une salve atteint une section du 16° bataillon de chasseurs prêtés par la 42° division. Déprimé par la casse que lui a causé cette salve d'artillerie, le 16° bataillon de Chasseurs replie ses avant-postes. Dès lors, la bataille de Mondement va se jouer entre l'infanterie allemande du 164° hanovrien et l'infanterie française du 77° RI épaulé par les zouaves.
13 h 15
Une patrouille conduite par le colonel Lestoquoi et le capitaine de Courson de la Villeneuve est accueillie par des coups de fusil tirés du village.
13 h 30
Les bataillons Lachèze et Lagrue du 1° Régiment de Marche des Zouaves sont sous le feu meurtrier qui part du château.
Le commandant de Beaufort du 77° RI tente d'avancer d'une cinquantaine de mètres. Les pertes sont sanglantes. Il décide d'utiliser la route Broyes-Mondement comme axe d'attaque par le sud.
Le général Humbert se dirige vers Mondement : - "Alors commandant de Beaufort, le château n'est pas pris? Qu'attendez-vous ?" - "Mon général c'est une forteresse, il faut un bombardement d'artillerie." - "C'est bon, nous allons faire donner l'artillerie et vous attaquerez, c'est l'ordre ! Il faut absolument reprendre le château."Dans le château, 250 hommes autour des sous-lieutenant Dettmer et Naumann et du lieutenant Lefevre et d'autres officiers ont reçu des cartouches et sont installés près des fenêtres garnies de matelas et de tables.A 14 h 20, l'artillerie française pilonne le château pendant 10 minutes. Les canons de 75 provoquent 2 ou 3 brèches dans le mur du potager.
A 14 h 30, le 2° bataillon partira : la 5° compagnie en tête, colonne par quatre, la 7° suivra à 400 m et la 8° se dirigera vers la droite pour essayer par le Nord-Est de prendre le château à revers.
La 6° compagnie restera à la lisière du bois. Les zouaves feront la liaison avec les autres bataillons du 77° RI qui attaqueront.
Le commandant de Beaufort charge le prêtre soldat Gallard de donner l'absolution à ceux qui le souhaitent.
La charge héroïque. Le lieutenant Génois part le premier avec dans sa compagnie de nombreux réservistes qui arrivent de Cholet.
Le commandant de Beaufort appelle à ses côtés le clairon Marquet, il met ses gants blancs, prend son bâton et s'écrie: " En avant, mes enfants, pour la France, chargez!"
D'un seul bond la 5° compagnie, derrière son chef, arrive au mur du potager. Pas de coups de feu. Le lieutenant Génois s'élance vers la grille : "Rendez-vous!" crie-t-il ! Les tirs commencent, les autres compagnies arrivent sur la route.
Le commandant de Beaufort se dirige vers l'une des brèches, le clairon Marquet est blessé. Le commandant de Beaufort s'arrête près d'un arbre, il est tué net d'une balle en plein front.
Le fantassin Durand s'apprête à franchir la brèche, l'adjudant-chef Parpaillon " vieux médaillé " lui dit: « arrête, laisse moi passer.». Une balle le touche en plein coeur. Le capitaine Secondat de Montesquieu, ganté de blanc, le sabre au clair se dirige vers le mur avec le soldat Atle. Une même balle les tue tous les deux. Le sergent-clairon Marquet se dresse, porte son clairon à ses lèvres sanglantes et dans un suprême effort sonne les dernières notes de la charge et meurt. Il n'y a aucun corps à corps, l'ennemi fait feu derrière les fenêtres. A l'Ouest du château, les 1° et 3° section qui restent de la 16° compagnie du capitaine Durand essaient d'escalader la grille. Ils tombent en tas ou restent suspendus tout sanglants aux barreaux de fer. Les ordres de repli sont donnés, la charge héroïque a duré 30 minutes.
16 h 30
Ordre de canonner le château. Le général Humbert transmet au colonel Lestoquoi: « reprendre l'attaque par tout le régiment. » Le colonel Lestoquoi exige d'abord des canons pour tirer à " la bricole " sur le château. Il surveille, abrité derrière un arbre les brancardiers qui se font tirer dessus. Il fait alors mettre la baïonnette au canon à ses hommes. Pendant ce temps, notre artillerie tire sur le village. L'artillerie allemande répond. Les documents ennemis, étudiés après la guerre, indiquent que les allemands ont pris les brancardiers pour des officiers entraînant leurs troupes. Ils appelleront cette escarmouche la 3° attaque française de 16 h 30.
17 h 45
Le capitaine Naud a fait amener 2 pièces de 75 et 2 caissons à 300 m du château, au Sud. Les troupes doivent s'élancer, une nouvelle fois à l'attaque du château à 18 h 30. Les 4 compagnies du premier bataillon marcheront sur le village. Le 2° bataillon s'élancera dans le potager. Les zouaves du capitaine Durand assureront la liaison entre les bataillons du 77° RI.
18 h 00
Un cinquième obus tombe sur l'aile sud. A la bricole, le colonel Lestoquoi fait tirer une trentaine d'explosifs. Tous ces obus à la mélinite portent. Les toitures flambent. Les allemands évacuent les étages supérieurs. Le capitaine Purgold de la ferme ouest apprend que son régiment a quitté Oyes et qu'il se replie vers Etoges. Il est abandonné avec ses hommes. Il donne l'ordre d'évacuer le village et le château. Le lieutenant Lefevre quitte le château le dernier, n'y laissant qu'un seul blessé grave. Quelques instants plus tard, le colonel Lestoquoi, le lieutenant Courson de la Villeneuve, le capitaine Beziers franchissent la grille avec le 3° bataillon. « Je tiens le village et le château de Mondement. Je m'y installe pour la nuit.» annonce le colonel Lestoquoi au général Humbert.
18 h 30: la fin des combats.
Les blessés du 164° hanovrien seront faits prisonniers à l'ambulance de Congy. Les autres soldats commenceront la retraite de la Marne. Les Français quitteront Mondement le 10 septembre après avoir enterré et rendu les honneurs aux morts et évacué les blessés sur l'hôpital de Sézanne. Elie Chamard est un ancien du 77° RI où il a servi pendant les 50 mois de la guerre. Ennemi des légendes, il a recoupé toutes les informations pour publier son livre: " La bataille de Mondement" en 1939. Il est entré en relation avec le capitaine Purgold, le lieutenant Naumann, le lieutenant Lefèvre qui commandaient les troupes allemandes du 164° Hanovrien à Mondement. Ceux-ci ont approuvé le travail d’Elie Chamard. C'est son travail que nous avons retenu, après recoupage avec d'autres sources.
Document Mondement 1914.